Les Sorcières de Salem, Arthur Miller

Un drame historique...

L’association L’Astrolabe 44 – Arts de la scène et lien social – présentera les 11, 12 et 13 mars 2016, au théâtre Jean Bart à Saint-Nazaire,  la pièce d’Arthur Miller Les sorcières de Salem, traduction et adaptation française de Marcel Aymé.

22 comédiens, musiciens et chanteurs sur scène. Mise en scène : Pierre Reipert.

C’est au tout début des années 1950, en pleine montée d’un violent courant anti-communiste aux Etats-Unis, qu’Arthur Miller décide de s’intéresser aux procès en sorcellerie qui se sont déroulés à Salem. Il se rend dans la ville et étudie les archives du tribunal. Arthur Miller est alors un auteur reconnu, après le succès de Ils étaient tous mes fils et de Mort d’un commis voyageur

C’est à la lecture des archives des procès de Salem qu’il décide d’en faire un sujet dramatique. « J’avais entendu parler de la chasse aux sorcières de Salem bien avant l’avènement du maccarthysme, et elle était toujours restée pour moi un mystère inexplicable. Cependant, lorsque j’y regardais de plus près, à la lumière des événements contemporains, c’était le mystère des consciences qu’on livrait qui m’apparaissait comme le fait le plus révélateur de notre époque » (A. Miller.- Essai sur le théâtre. R. Laffont, 1967).

La pièce sera jouée pour la première fois aux Etats-Unis en 1953, quelques mois avant l’exécution des époux Rosenberg. Elle est reprise en France en 1955, dans une adaptation de Marcel Aymé mise en scène par Raymond Rouleau, avec la participation de Simone Signoret, Yves Montand et Pierre Mondy

 

Affiche Sorcieres

Résumé de la pièce

En 1692, Abigaïl Williams, une jeune femme habitant Salem Village dans le Massachusetts, est servante dans une famille de fermiers, les Proctor. Abigaïl tombe amoureuse de John Proctor qui en fait sa maîtresse. Élisabeth, sa femme, découvre leur relation et la chasse de la maison. Pour se venger, la jeune fille, âgée de 17 ans, se livre avec Tituba, la servante noire du révérend Parris (oncle d’Abigaïl), et Betty, la fille de ce dernier, à un rituel de sorcellerie. Elles sont découvertes dansant nues dans la forêt et la rumeur de sorcellerie se répand très vite dans le village. Abigaïl, profitant de la situation pour se venger d'Élisabeth Proctor et récupérer son amant, met en branle une impitoyable machine judiciaire. Au cours d’un procès en sorcellerie, plus de 20 habitants du seul village de Salem – dont John et Elisabeth Proctor - seront condamnés à mort et pendus.

Salem image du proces

Salem, une ville de sorcières

La ville de Salem, fondée en 1626 par des pêcheurs devînt, un temps, grâce à son port, la ville la plus importante de la côte Est de l’Amérique du Nord. Le développement de Boston et de New-York lui fit perdre rapidement cette position. Ce sont donc les procès en sorcellerie qui s’y sont déroulés du printemps à l’automne 1692 qui ont fait sa renommée.

Dans la deuxième moitié du XVIIe siècle, les colons vivent dans l'angoisse : depuis la perte de leur charte avec la Couronne d’Angleterre, ils ne peuvent plus compter sur son soutien avec, entre autres, la perte de leurs titres de propriété. Le soulèvement général des Amérindiens  (1675-76) va décimer la population, des raids et des coups de mains des « peaux rouges » se produisent encore épisodiquement. Cependant la Nouvelle-Angleterre se transforme en une colonie marchande et s'enrichit. Les puritains considèrent cette évolution comme un péché autant que comme une nécessité et, au fur et à mesure que la classe des marchands s'élève dans l'échelle sociale, l’influence du clergé décline.

Salem accuses et accusateurs

Pour galvaniser leurs fidèles face aux idées nouvelles, les pasteurs assimilaient souvent les Amérindiens aux démons. C’est cette atmosphère de peur qui contribua beaucoup au développement d’une forme d’hystérie collective : la plupart des victimes d'accusations possédaient de forts liens personnels ou sociaux avec les victimes des attaques amérindiennes.

Cette affaire traumatisa toute la colonie. Elle eut un impact si profond qu'elle a contribué à réduire l'influence de la foi puritaine sur le gouvernement de la Nouvelle-Angleterre et a indirectement conduit aux principes fondateurs des États-Unis d’Amérique.

La plupart des personnages mentionnés dans la pièce ont réellement existé ; et ont agit de la manière dont ils sont présentés dans « Les sorcières de Salem », même si Arthur Miller confie lui-même qu’il a atténué la dureté des comportements de certains, dont celui du juge gouverneur Dantforth. Il semble que l’esclave noire Tituba, soit en réalité une indienne d’Amérique du Sud que John Parris, qui a vécu lui aussi à la Barbade, a emmenée avec lui dans le Massachusetts. A l’exception du juge Hathorne, tous les accusateurs des procès de Salem ont publiquement regretté leurs positions et leurs actes dans les années qui suivirent.

Carte de salem ville (port)

Le thème de la peur

Dsc 0755On a vu dans la pièce d’Arthur Miller une référence aux dérives puritaines remontant à la fondation des États-Unis mais aussi aux ravages provoqués par le maccarthysme, dont Arthur Miller fut l'une des victimes. Les périodes de crise, de peur du lendemain, sont propices à la désignation de boucs émissaires. Nous en avons de nombreux exemples dans la période que nous vivons actuellement. Le sentiment de peur a des causes bien réelles et ses conséquences  bien réelles aussi (repli sur soi, difficultés à dialoguer, sentiment de honte, voire de culpabilité…).

Les Sorcières de Salem est une œuvre capitale pour se rappeler que la frontière entre raison et folie, entre justice et fanatisme, est parfois - et en tout temps - facilement franchie.

Pour en savoir plus

Lire

  • Arthur Miller.- Essai sur le théâtre. In : Théatre 1 .- R. Laffont, 1967
  • Arthur Miller. – Au fil du temps. Une vie.- Grasset, 1988
  • Leyla Dakhi, Bernard Maris, Roger Sue, Georges Vigarello.- Gouverner par la peur. – Fayard, 2007
  • Jean-Claude Carriere.- Croyance.- Odile Jacob, 2015
  • Maryse Condé.- Moi Tituba, sorcière.- Gallimard Folio, 1988

Sur le net

On écoutera avec émotion Bernard Maris, "oncle Bernard", parler de la peur et l'insécurité : http://www.ina.fr/video/I15007808

Enfin, nous avons puisé dans de nombreux articles de l’encyclopédie Wikipedia

 

Bernard Maris,